Claude QUENAULT
Avril 2023
Un grand frère attentif à la jeunesse
A la fin des années 1960, je suis directeur de la Maison des jeunes et de la culture (MJC) de Sarcelles, par ailleurs militant du PSU et en 1971, je me présente à l’élection municipale sur une liste d’action municipale socialiste avec le PSU. A cette occasion, je rencontre pour la première fois Michel Rocard, venu nous soutenir lors d’un meeting politique. N’étant pas élu, je suis muté par la Fédération française des MJC à Conflans-Sainte-Honorine et je deviens le directeur d’une petite MJC dans une municipalité de droite.
En 1977, Michel Rocard et Jean-Paul Huchon décident de se présenter à l’élection municipale de Conflans-Sainte-Honorine. Auparavant, Michel avait été député dans une autre circonscription des Yvelines, mais il voulait, avec Jean-Paul Huchon, participer à l’animation municipale d’une ville comme Conflans-Sainte-Honorine. Ils gagnèrent l’élection, dans laquelle je m’impliquais largement.
Tout de suite, Michel Rocard engageait une politique sociale et culturelle et surtout réveillait une ville bien endormie au bord de la Seine, avec une population importante de bateliers (Conflans-Sainte-Honorine, capitale de la batellerie).
Michel Rocard et son équipe développèrent une politique audacieuse en direction de la jeunesse. La MJC, à l’étroit dans son « mille club », hérita du vaste château au bord de la Seine nommé « les Terrasses ». Elle créa le premier festival de café-théâtre en France, proposa aux habitants une quarantaine d’activités artistiques, d’animations et de projets divers. L’ouverture d’un centre de plein air, à Navarrenx (Béarn) permit la mise en place de nombreux séjours de vacances pour adolescents, et éventuellement leurs familles.
Par la force des choses et des événements ; ainsi que mes relations personnelles avec Michel Rocard, je fus largement associé à la politique municipale jusqu’en 1983, où je rejoignis le cabinet d’Alain Calmat, ministre de la jeunesse et des sports, comme chargé de mission.
A ce titre, en 1984, j’organisais, pour le compte de l’Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ), dont j’ai été ensuite le secrétaire général de 1989 à 1993, un projet Québec/Saint-Malo sur le paquebot « Le Mermoz » appelé « Cap sur l’Avenir » : 400 jeunes, québécois et français, partagèrent leurs projets pour l’an 2000.
En 1985, je proposais un train Paris/Pékin pour 450 jeunes dans le cadre de l’année internationale de la jeunesse : un train pour la paix sous l’égide des Nations-Unies. Ce projet incroyable avait reçu le soutien du ministre de la Jeunesse et des Sports et de Michel Rocard.
Ancien apprenti ouvrier, animateur d’éducation populaire, j’ai pu bénéficier largement d’un soutien indéfectible de Michel Rocard pendant plus de 30 ans, et grâce à lui, accéder à d’incroyables responsabilités : le cabinet de Roger Bambuck, secrétaire d’État à la Jeunesse et aux Sports, de 1988 à 1989, après celui d’Alain Calmat, secrétaire national de la nouvelle confédération des MJC de France de 1993 à 1998. De plus, pendant toute cette période conflanaise, j’ai pu accéder à des diplômes universitaires et à des fonctions de chargé de cours à la Sorbonne Nouvelle, en DUT carrières sociales, à l’École Pratique des Hautes Etudes, etc.
Michel Rocard avait une grande confiance en moi et m’a permis de réaliser des projets pour la jeunesse, leur proposant un avenir possible. Il était pour moi, un grand frère, généreux, solidaire et proposant un socialisme à toute épreuve, au-delà des discours, un véritable homme de terrain. Il m’a fait parvenir de la condition « d’établi[1] d’un atelier motoriste » à celle de conseiller d’un cabinet ministériel de la République.
Je suis très heureux de cette vie fraternelle partagée.
Claude QUENAULT
Claude Quenault a publié aux Éditions Albin Michel : « Parler en public à l’ère de la communication numérique, c’est facile »